
La tontine agricole au Niger : une solution de solidarité rurale
Dans les villages du Niger, il n’est pas
toujours facile d’avoir accès à une banque, encore moins à un crédit pour
financer les activités agricoles. Pourtant, les agriculteurs ont besoin
d’argent pour acheter des semences, des outils, du fumier, ou encore pour faire
face aux urgences familiales. C’est dans ce contexte que la tontine prend tout
son sens. Il s’agit d’un système d’épargne communautaire, basé sur la
confiance, la solidarité et l’organisation entre les membres d’un même groupe.
La tontine n’est pas nouvelle au Niger. Elle existe depuis longtemps dans les
quartiers, les villages, et même dans les marchés. Mais depuis quelques années,
elle prend une place de plus en plus importante dans le secteur agricole. On
parle alors de tontine agricole.
La tontine agricole est un système dans lequel
un groupe d’agriculteurs (ou d’éleveurs) décide de se réunir régulièrement pour
épargner ensemble. Chaque membre verse une somme fixe à chaque rencontre. À
tour de rôle, chaque personne reçoit la totalité de la cagnotte. L’argent reçu
peut servir à acheter des semences, réparer une charrue, payer un ouvrier
agricole, ou encore stocker la production.
Contrairement à un crédit bancaire, il n’y a pas d’intérêt à rembourser, et les
conditions sont décidées entre les membres du groupe. Cela renforce la
confiance, et encourage les petits producteurs à épargner sans crainte.
Dans les zones rurales nigériennes, l’accès
aux institutions financières est très limité. Les banques sont rares, parfois
absentes. Même quand elles sont présentes, beaucoup d’agriculteurs n’ont pas
les garanties nécessaires pour obtenir un prêt. En plus, les procédures sont
longues et complexes.
La tontine apparaît alors comme une solution simple et accessible. Elle ne
demande pas de formalités compliquées. Elle s’appuie sur des relations de
proximité et de confiance. C’est aussi un outil d’autonomisation, notamment
pour les femmes rurales, qui y trouvent un moyen d’agir, de s’organiser et de
développer leurs activités.
Dans le village de Goubey, une quinzaine de femmes agricultrices ont décidé de se réunir chaque semaine pour créer une tontine. Chacune verse 1 000 francs CFA tous les vendredis. À chaque réunion, une femme reçoit les 15 000 francs. Certaines utilisent l’argent pour acheter des semences ou des engrais, d’autres pour payer la scolarité des enfants ou soigner un animal malade. En fin de saison, le groupe décide d’acheter en commun un sac de semences pour le champ collectif. Grâce à cette tontine, les femmes ont pu améliorer leur production et renforcer leur entraide.
Les tontines agricoles offrent de nombreux
avantages. Elles permettent d’épargner petit à petit, sans stress. Elles
encouragent la discipline financière. Elles créent une entraide forte entre les
membres du groupe. Elles sont aussi un bon moyen d’investir dans des projets
agricoles ou d’élevage, sans passer par une institution bancaire.
Cependant, elles ont aussi leurs limites. Par exemple, si un membre ne respecte
pas ses engagements, cela peut créer des tensions dans le groupe. Si la somme
cotisée est faible, elle ne suffit pas toujours pour financer de grands
projets. Enfin, en cas de mauvaise récolte, certains membres peuvent avoir du
mal à verser leur contribution.
Pour que les tontines agricoles deviennent un
véritable outil de développement, il est important de les accompagner. D’abord,
en formant les membres à la gestion de groupe, à la tenue de registres simples,
et à la planification de l’épargne. Ensuite, en les connectant à des
organisations agricoles ou à des projets de développement, qui peuvent leur
fournir du matériel ou un appui technique.
Il est aussi possible de créer des tontines numériques, avec des transferts via
téléphone mobile. Cela permet plus de sécurité et de transparence. Certaines
ONG au Niger ont déjà commencé à tester ces solutions, avec de bons résultats.
La tontine agricole est une solution locale, simple et efficace, qui permet aux agriculteurs nigériens de mieux gérer leurs ressources et d’investir dans leur avenir. Basée sur la solidarité, elle s’adapte bien à la réalité du monde rural. Avec un peu de formation et de soutien, elle peut devenir un levier puissant pour lutter contre la pauvreté et renforcer l’autonomie des producteurs.